chapitre précédent retour chapitre suivant

Bible de Jérusalem – Habakuk 1

HABAQUQ

Introduction au livre d’Habaquq

Titre.

1 L’oraclea que reçut en vision Habaquq le prophète.

a Littéralement « charge », « fardeau », cf. Isa 13.1, etc., et Jr 23.33-40.

I. Dialogue entre le prophète et son Dieu

Première plainte du prophète : la déroute de la justice.b

2 Jusques à quand, Yahvé, appellerai-je au secours
sans que tu écoutes,
crierai-je vers toi : « À la violence ! »
sans que tu sauves ?

b Au nom de son peuple, cf. Jr 10.23-25 ; 14.2-9, 19-22 ; Isa 59.9-14, le prophète se plaint à Yahvé des malheurs publics. Ce texte, proche des complaintes du Psautier et de Jérémie, pourrait, considéré isolément, être rapporté aux désordres intérieurs d’une société ; mais, dans le contexte des vv. 12-17, il vise sans aucun doute l’oppression chaldéenne. Pourquoi la justice et la bonté de Yahvé (et sa sainteté, v. 13) tolèrent-elles le triomphe de l’impie ? Car c’est un païen qui domine, et Juda, même pécheur, demeure un « juste », connaissant le vrai Dieu. À Yahvé de répondre, cf. 2.1.

3 Pourquoi me fais-tu voir l’iniquité
et regardes-tu l’oppression ?
Je ne vois que rapine et violence,
c’est la dispute, et la discorde sévit !
4 Aussi la loi se meurt,
plus jamais le droit ne paraît !
Oui, l’impie traque le juste,
aussi ne paraît plus qu’un droit fléchi !

Premier oracle. Les Chaldéens fléau de Dieu.c

5 Regardez parmi les peuples, voyez,
soyez stupides et stupéfaits !
Car j’accomplis de vos jours une œuvred
que vous ne croiriez pas si on la racontait.

c Première réponse. C’est Yahvé lui-même qui suscite le fléau chaldéen. Ces païens sont l’instrument de sa justice, pour un temps. Cf. Am 3.11 ; Isa 10.5-27 ; Jr 5.14-19 ; 25.1-13 ; 27.6-22 ; 51.20-23 ; Dt 28.47s ; 2 R 24.2-4. Cf. Nabuchodonosor, « mon serviteur », Jr 25.9 ; 27.6 ; 43.10.

d Avec grec ; l’hébr. peut aussi se comprendre « (une œuvre) s’accomplit ».

6 Oui ! voici que je suscite les Chaldéens,
ce peuple farouche et fougueux,e
celui qui parcourt de vastes étendues de pays
pour s’emparer des demeures d’autrui.

e Les images qui vont composer une description épique de l’invasion se retrouvent maintes fois chez les prophètes, cf. Isa 5.26-29 ; 13.17-18 ; Jr 4.5-7, 13, 16-17 ; 5.15-17 ; 6.22-24 ; Na 3.2-3 ; Ez 23.22-26 ; 28.7-10.

7 Il est terrible et redoutable,
sa force faitf son droit, sa grandeur !

f Littéralement « de lui-même sortent ». Ce peuple ne reconnaît ni Dieu ni maître et n’attribue qu’à lui-même ses succès. Cf. v. 11b.

8 Ses chevaux sont plus rapides que panthères,
plus mordants que loups du soir ;
ses cavaliers bondissent,
ses cavaliers arrivent de loin,
ils volent comme l’aigle qui fond pour dévorer.
9 Tous arrivent pour le pillage,
la face ardente comme un vent d’est ;g
ils ramassent les captifs comme du sable !

g Texte incertain. — « la face ardente » conj. ; « l’ardeur (ou la convoitise) de leurs faces » hébr. — « un vent d’est » avec 1 Qp Hab (commentaire d’Habaquq découvert à Qumrân) et Vulg. ; « vers l’est » ou « vers l’avant » hébr. Le vent d’est, vent desséchant du désert, est parfois le symbole des invasions venues de l’est, cf. Os 12.2 ; 13.15 ; Jr 18.17 ; Ez 17.10s. — On traduit aussi « la direction de leurs faces vers l’avant ».

10 Ce peuple se moque des rois,
il tourne les princes en dérision.
Il se rit de toutes forteresses :
il entasse de la terreh et les prend !

h Remblais ou levées de terre utilisés pour les sièges.

11 Puis le vent a tourné et s’en est allé...i
Criminel qui fait de sa force son Dieu !

i Comme l’ouragan, l’invasion passe puis s’en va, ne laissant que ruines sur son passage. — D’autres comprennent « Alors l’esprit est passé et s’en est allé » (une phase de l’inspiration prophétique est achevée) ; « Alors il (l’envahisseur) a changé d’esprit et a transgressé (sa mission ?) ».

Seconde plainte du prophète : les exactions de l’oppresseur.j

12 Dès les temps lointainsk n’es-tu pas Yahvé,
mon Dieu, mon Saint, qui ne meurs pas ?l
Tu l’avais établi, Yahvé, pour exercer le droit,
tel un rocher,m pour châtier, tu l’avais affermi !n

j Cette nouvelle plainte reprend la première, vv. 2-4 puisque le triomphe des Chaldéens a pour cause ultime la volonté de Yahvé, vv. 5-6, et c’est donc Yahvé qu’il faut interroger. Comment, juste et saint, gardien du droit, vv. 12a-b, 13, peut-il ainsi traiter les nations et le peuple élu, v. 14 ? Laissera-t-il l’impie engloutir le juste, v. 13, cf. vv. 4 et 15-17 ?

k Ceux de l’Exode, que rappellera le chap. 3. Là demeure pour Habaquq le motif de l’espérance.

l « qui ne meurs pas » lo’ tamût conj. ; « nous ne mourrons pas » lo’ namût hébr., mais c’est là le résultat d’une correction de scribe et la traduction rétablit ce qui devait être le texte primitif.

m Littéralement « et un rocher ». Ou bien « ô Rocher », cf. Dt 32.4.

n Le peuple chaldéen, suscité pour une mission de justice qu’il ne doit pas outrepasser, cf. 1.5. Pour d’autres, il s’agit d’Israël, qui devait être l’arbitre des peuples, ou du roi de Juda, Joiaqim, infidèle à sa mission 1.2-4, 12-17 et 2.6-19 seraient dirigés contre lui.

13 Tes yeux sont trop purs pour voir le mal,
tu ne peux regarder l’oppression.
Pourquoi regardes-tu les gens perfides,
gardes-tu le silence quand l’impie engloutit un plus juste que lui ?
14 Tu traites les humains comme les poissons de la mer,
comme la gent qui frétille, sans maître !
15 Ilo les prend tous à l’hameçon,
les tire avec son filet,
il les ramasse avec son épervier,
et le voilà dans la joie, dans l’allégresse !

o L’envahisseur chaldéen.

16 Aussi sacrifie-t-il à son filet,
fait-il fumer des offrandes devant son épervier,
car ils lui procurent de grasses portions
et des mets plantureux.p

p « plantureux », en lisant un masculin au lieu du féminin hébr.

17 Videra-t-il donc sans trêve son filet,q
massacrant les peuples sans pitié ?

q « filet » hermo pourrait être une répétition fautive du v. 16. Hab lit « épée » herbo et supprime l’interrogation « c’est pourquoi il tirera sans trêve son épée ».

chapitre précédent retour chapitre suivant