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Bible de Jérusalem

Ésaïe 8.5-

Siloé et l’Euphrate.v

5 Yahvé me parla encore en disant :

v Les eaux de Siloé, v. 6, cf. 7.3, symbolisent la protection divine à laquelle le peuple a préféré l’aide de l’Assyrie (« le Fleuve », v. 7, c’est-à-dire l’Euphrate) qui se retournera contre lui, cf. 7.1.

6 Puisque ce peuple a méprisé les eaux de Siloé qui coulent doucement, et a trembléw devant Raçôn et le fils de Remalyahu,

w « a tremblé (litt. fondu) devant » conj. ; l’hébr. « exultation » (?) est inintelligible, à moins qu’il ne faille chercher à rattacher ce mot au verbe de la même racine « se réjouir », et voir là une allusion à un parti pro-syrien qui se serait constitué en Juda. Les versions ont compris « choisi (pour roi) », qui est historiquement impossible.

7 eh bien ! voici que le Seigneur fait monter contre lui les eaux du Fleuve, puissantes et abondantes (le roi d’Assur et toute sa gloire) ; il grossira dans toutes ses vallées et franchira toutes ses rives ; 8 il passera en Juda, inondera et traversera ; il atteindra jusqu’au cou, et le déploiement de ses ailes couvrira toute l’étendue de ton pays, Emmanuel.x

x Le rappel de ce nom prophétique, cf. 7.14, ici et, en clair, au v. 10, souligne l’unité de ce groupe d’oracles les châtiments annoncés préparent l’accomplissement des promesses.

9 Sachez,y peuples, et soyez épouvantés ; prêtez l’oreille, tous les pays lointains.

Ceignez-vous et soyez épouvantés. Ceignez-vous et soyez épouvantés.

y « sachez » grec ; « alliez-vous » (?) hébr.

10 Faites un projet : il sera anéanti,
prononcez une parole : elle ne tiendra pas,
car « Dieu est avec nous ».

La mission d’Isaïe.z

11 Oui, ainsi m’a parlé Yahvé lorsque sa main m’a saisi
et qu’il m’a appris à ne pas suivre le chemin de ce peuple, en disant :

z Isaïe semble exprimer ici, peut-être à l’intention de ses disciples, v. 16, des confidences sur les motifs de son attitude. C’est Yahvé lui-même qui lui a appris à s’opposer au peuple de Juda et à n’avoir confiance qu’en Dieu — attitude difficile, dans des circonstances parfois ambiguës, vv. 14, 15, destinée à faire apparaître la vraie fidélité.

12 « Vous n’appellerez pas complot tout ce que ce peuple appelle complot,
vous ne partagerez pas ses craintes et vous n’en serez pas terrifiés.
13 C’est Yahvé Sabaot que vous proclamerez saint,
c’est lui qui sera l’objet de votre crainte et de votre terreur.
14 Il sera un sanctuaire,a un rocher qui fait tomber,
une pierre d’achoppement pour les deux maisons d’Israël,
un filet et un piège pour les habitants de Jérusalem.

a Au lieu de « sanctuaire » miqdash, le Targ. a lu « piège » moqesh, comme à la fin du v. Le texte actuel paraît être une erreur ou une correction de scribe.

15 Beaucoup y achopperont, tomberont et se briseront,
ils seront pris au piège et capturés.
16 Enferme un témoignage, scelle une instruction
au cœur de mes disciples. »
17 J’espère en Yahvé qui cache sa face à la maison de Jacob,
et je mets mon attente en lui.
18 Voici que moi et les enfants que Yahvé m’a donnés
nous devenons signes et présages en Israël,
de la part de Yahvé Sabaot qui habite sur la montagne de Sion.
19 Et si on vous dit : « Allez consulter les spectres et les devins
qui murmurent et qui marmonnent »,
n’est-il pas vrai qu’un peuple consulte ses dieux,
et les morts pour les vivants ?
20 Pour l’instruction et le témoignage,
sûrement on s’exprimera selon cette parole
d’après laquelle il n’y a pas d’aurore.b

b Les vv. 19-20, qui sont peut-être hors de leur contexte, sont très obscurs. Isaïe rapporte les paroles de ses adversaires, qui revendiquent pour le peuple le droit de pratiquer la divination, cf. 2.6. La réponse, v. 19, est peut-être ironique, et le prophète paraît conclure, v. 20, en constatant que de tels propos conduisent à une impasse. Mais tout cela repose sur un texte mal assuré.

La marche dans la nuit.c

21 Et il passera dans le pays, opprimé et affamé ;
il arrivera que lorsqu’il sera affamé, il s’irritera,
il maudira son roi et son Dieu, et se tournera vers le ciel.

c Ici encore, il semble s’agir d’un fragment d’oracle déplacé. En gros, on devine la description d’un homme qui traverse le pays ravagé et qui exprime sa détresse. Mais on ne voit pas comment relier ce bref poème au contexte immédiat. Il faut peut-être le rapprocher de 5.26-30 qu’il continuerait assez bien.

22 Puis il regardera vers la terre ; et voici : angoisse, obscurité, nuit de détresse, ténèbres dissolvantes.

23 Car n’est-ce pas la nuit pour le pays qui est dans la détresse ?
Comme le passé a humilié le pays de Zabulon et le pays de Nephtali, l’avenir glorifiera le chemin de la mer, au-delà du Jourdain, le district des nations.d

d Ce v. qui oppose, pour les régions du nord de la Palestine, un avenir glorieux à un passé d’humiliations, paraît faire allusion aux campagnes de Téglat-Phalasar en Galilée et à la déportation de 732, cf. 2 R 15.29. Dans l’oracle qui suit, Isaïe annonce un « jour de Yahvé » qui apportera la délivrance aux déportés ; il annonce en même temps le règne pacifique d’un enfant de race royale, l’Emmanuel de 7.14. L’apparition du Messie en Galilée donnera à cette prophétie sa pleine réalisation, cf. Mt 4.13-16. Le « district des nations » (hébr. gelîl ha-goyim) désigne la Galilée.