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Bible de Jérusalem

Matthieu 4.3-4

3 Et, s’approchant, le tentateur lui dit : « Si tu es Fils de Dieu,q dis que ces pierres deviennent des pains. »

q Le titre biblique de « Fils de Dieu » n’exprime pas nécessairement une filiation de nature, mais peut comporter simplement une filiation adoptive, résultant d’un choix divin qui établit entre Dieu et sa créature des relations de protection particulière. C’est ainsi que ce titre est attribué aux anges, Jb 1.6, au Peuple élu, Ex 4.22 ; Sg 18.13 ; aux Israélites, Dt 14.1 ; Os 2.1 ; cf. 5.9, 45, etc. ; à leurs chefs, Ps 82.6. Quand donc il est dit du Roi-Messie, 1 Ch 17.13 ; Ps 2.7 ; 89.27, il n’exige pas que celui-ci soit plus qu’humain ; et il n’est pas requis de supposer davantage dans la pensée de Satan, 4.3, 6, des démoniaques, Mc 3.11 ; 5.7 ; Lc 4.41, a fortiori du centurion, Mc 15.39, cf. Lc 23.47. Même la parole du Baptême, 3.17, et de la Transfiguration, 17.5, n’impliquerait pas de soi plus que la faveur spéciale accordée au Messie Serviteur ; et la question du grand prêtre, 26.63, ne dépassait sans doute guère cette signification messianique. Mais le titre de « Fils de Dieu » reste ailleurs ouvert à la valeur plus haute d’une filiation proprement dite, et Jésus l’a clairement suggérée en se désignant comme « le Fils », 21.37, supérieur aux anges, 24.36, ayant Dieu pour « Père » à un titre tout spécial, Jn 20.17 et cf. « mon Père », 7.21, etc., parce qu’il entretient avec lui des relations uniques de connaissance et d’amour, 11.27. Ces déclarations, appuyées par d’autres sur le rang divin du Messie, 22.42-46, et sur l’origine céleste du « Fils de l’homme », 8.20, confirmées enfin par le triomphe de la Résurrection, ont donné à l’expression « Fils de Dieu » le sens proprement divin qui se retrouvera, par exemple, chez saint Jean, Jn 1.18. Si les disciples n’en ont pas pris clairement conscience dès le vivant de Jésus (14.33 ; 16.16, en ajoutant cette expression au texte plus primitif de Mc, reflètent sans doute une foi plus évoluée), la foi qu’ils ont définitivement acquise après Pâques, avec l’aide du Saint-Esprit, ne s’en appuie pas moins réllement sur les paroles historiques du Maître, qui a exprimé autant que pouvaient le porter ses contemporains sa conscience d’être le propre Fils du Père.

4 Mais il répondit : « Il est écrit :

Ce n’est pas de pain seul que vivra l’homme,
mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »;

Matthieu 14.13-21

Première multiplication des pains.r

13 L’ayant appris, Jésus se retira en barque dans un lieu désert, à l’écart ;s ce qu’apprenant, les foules partirent à sa suite, venant à piedt des villes.

r Alors que Lc 9.10-17 et Jn 6.1-13 ne racontent qu’une seule multiplication des pains, 14.13-21 ; 15.32-39 et Mc 6.30-44 ; 8.1-10 en rapportent deux. Sans doute s’agit-il d’un doublet, assurément très ancien, cf. 16.9s, qui présente le même événement selon deux traditions différentes. La première, plus archaïque, d’origine palestinienne, semble placer l’événement sur la rive occidentale du lac (voir la note suivante) et parle de douze couffins, chiffre des tribus d’Israël et des apôtres, Mc 3.14. La deuxième, qui viendrai de milieux chrétiens d’origine païenne, situe l’événement sur la rive orientale, païenne, du lac, cf. Mc 7.31, et parle de sept corbeilles, chiffre des nations de Canaan, Ac 13.19, et des diacres hellénistes, Ac 6.5 ; 21.8. Les deux traditions dépeignent l’événement à la lumière de précédents vétéro-testamentaires, en particulier la multiplication d’huile et de pain par Élisée, 2 R 4.1-7, 42-44, et l’épisode de la manne et des cailles, Ex 16 ; Nb 11. Reprenant avec une puissance encore supérieure ces gratifications de nourritures célestes, le geste de Jésus a été compris dès la plus ancienne tradition comme une préparation de la nourriture eschatologique par excellence, l’Eucharistie. C’est ce que soulignent la présentation littéraire des Synoptiques, comp. 14.19 ; 15.36 ; 26.26, et le discours sur le pain de vie de Jn 6.

s Rien n’oblige à penser à la rive orientale de lac. Jésus a pu traverser du nord au sud et du sud au nord en longeant la côte occidentale, et atteindre ainsi « l’autre rive », v. 22, de l’anse que trace cette côte.

t En suivant sur le rivage la barque qui navigue au large.

14 En débarquant, il vit une foule nombreuse et il en eut pitié ; et il guérit leurs infirmes.

15 Le soir venu, les disciples s’approchèrent et lui dirent : « L’endroit est désert et l’heure est déjà passée ; renvoie donc les foules afin qu’elles aillent dans les villages s’acheter de la nourriture. » 16 Mais Jésus leur dit : « Il n’est pas besoin qu’elles y aillent ; donnez-leur vous-mêmes à manger » — 17 « Mais, lui disent-ils, nous n’avons ici que cinq pains et deux poissons. » Il dit : 18 « Apportez-les moi ici. » 19 Et, ayant donné l’ordre de faire étendre les foules sur l’herbe, il prit les cinq pains et les deux poissons, leva les yeux au ciel, bénit, puis, rompant les pains, il les donna aux disciples, qui les donnèrent aux foules. 20 Tous mangèrent et furent rassasiés, et l’on emporta le reste des morceaux : douze pleins couffins ! 21 Or ceux qui mangèrent étaient environ cinq mille hommes, sans compter les femmes et les enfants.