C’est une grande science que de savoir que nous ne sommes rien que péché, afin que nous n’ayons pas des idées si froides et si relâchées sur le péché, que les docteurs du pape, qui ne tiennent pour péché que ce qu’on fait, que ce qu’on dit, que ce qu’on pense de contraire à la volonté de Dieu ; mais toi, chère âme, définis ainsi le péché ; dis, que le péché est toute cette masse corrompue qui est mise dans l’homme par les pères et mères avant même qu’il soit capable de rien faire, de rien dire ou de rien penser. Voilà la racine du mal, et de cette mauvaise racine, il ne saurait venir rien de bon, qui soit tenu tel devant Dieu ; d’après cela, il est facile de faire la distinction du péché ; savoir, qu’il y a un péché par lequel toute la nature est corrompue et infectée et soumise à la colère de Dieu. Ensuite, il y a une autre espèce de péché que l’homme peut en quelque façon connaître ; ayant la loi qui lui indique le bien et le mal, il peut savoir que les vols, les adultères, les meurtres sont des péchés. C’est de ce dernier genre de péché que les lois politiques parlent, et contre lequel elles agissent aussi, quoique souvent d’une manière bien peu efficace.