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Bible de Jérusalem

Apocalypse 6-9

L’Agneau brise les sept sceaux.u

6 Et ma vision se poursuivit. Lorsque l’Agneau ouvrit le premier des sept sceaux, j’entendis le premier des quatre Vivants crier comme d’une voix de tonnerre : « Viens ! »

u Les chap. 6-9 forment un tout. À mesure que l’Agneau descelle le Livre, 6-8.1, et que résonnent les trompettes, 8.2-9, se déroule la vision des événements qui annoncent et préparent la déroute de l’Empire romain, prototype des ennemis de Dieu. Cf. Mt 24. — Les quatre cavaliers de cette première vision sont inspirés de Za 1.8-10 ; 6.1-3 ; mais ils symbolisent aussi les quatre fléaux dont les prophètes menaçaient Israël infidèle bêtes fauves, guerre, famine, peste, cf. Lv 26.21-26 ; Dt 32.24 ; Ez 5.17 ; 14.13-21 ; et aussi Ez 6.11-12 ; 7.14-15 ; 12.16 ; 33.27.

2 Et voici qu’apparut à mes yeux un cheval blanc ; celui qui le montait tenait un arc ; on lui donna une couronne et il partit en vainqueur, et pour vaincre encore.v

v Le cavalier au cheval blanc fait penser aux Parthes (dont l’arme propre était l’arc), terreur du monde romain au Ier siècle, « fauves de la terre », v. 8 (cf. Dt 7.22 ; Jr 15.2-4 ; 50.17 ; Ez 34.28, et l’invasion décrite 9.13-21). Tout un courant de la tradition chrétienne a vu dans ce cavalier vainqueur le Verbe de Dieu lui-même, 19.11-16, ou l’expansion de l’Évangile.

3 Lorsqu’il ouvrit le deuxième sceau, j’entendis le deuxième Vivant crier : « Viens ! » 4 Alors surgit un autre cheval, rouge-feu ; celui qui le montait, on lui donna de bannir la paix hors de la terre, et de faire que l’on s’entr’égorgeât ; on lui donna une grande épée.w

w Symbole des guerres sanglantes provoquées par le premier cavalier.

5 Lorsqu’il ouvrit le troisième sceau, j’entendis le troisième Vivant crier : « Viens ! » Et voici qu’apparut à mes yeux un cheval noir ; celui qui le montait tenait à la main une balance,x

x Symbole de la famine denrées rationnées et prix exorbitants.

6 et j’entendis comme une voix, du milieu des quatre Vivants, qui disait : « Un litre de blé pour un denier, trois litres d’orge pour un denier ! Quant à l’huile et au vin, ne les gâche pas ! »

7 Lorsqu’il ouvrit le quatrième sceau, j’entendis le cri du quatrième Vivant : « Viens ! » 8 Et voici qu’apparut à mes yeux un cheval verdâtre ; celui qui le montait, on le nomme : la Mort ;y et l’Hadès le suivait.z
Alors, on leur donna pouvoir sur le quart de la terre, pour exterminer par l’épée, par la faim, par la peste, et par les fauves de la terre.

y La couleur « verte » est celle du cadavre qui se décompose, surtout par l’effet de la peste.

z Pour engloutir les victimes.

9 Lorsqu’il ouvrit le cinquième sceau, je vis sous l’autela les âmes de ceux qui furent égorgés pour la Parole de Dieu et le témoignage qu’ils avaient rendu.

a L’autel, 8.3 ; 9.13 ; 14.18 ; 16.7, répond dans cette liturgie céleste à l’autel des holocaustes, 1 R 8.64. Les martyrs, témoins de la Parole, sont associés à l’immolation de leur Maître, cf. Ph 2.17.

10 Ils crièrent d’une voix puissante : « Jusques à quand, Maître saint et vrai, tarderas-tu à faire justice, à tirer vengeanceb de notre sang sur les habitants de la terre ? »

b Comme pour les Psaumes qui font parler le peuple maltraité ou les innocents opprimés, cf. Ps 13.2-3 ; 58.11-12 ; 59.6, 14 ; 79.10 ; 83.14-19 ; 94.1-6, 16-23, l’appel à la vengeance est à comprendre comme une invocation confiante de Dieu, seul juge et sauveur, cf. Lc 18.7. Les martyrs sont invités à la patience (v. 11).

11 Alors on leur donna à chacun une robe blanchec en leur disant de patienter encore un peu, le temps que fussent au complet leurs compagnons de service et leurs frères qui doivent être mis à mort comme eux.

c Symbole de la joie triomphante 3.5 ; 7.9, 13-14 ; 19.8.

12 Et ma vision se poursuivit. Lorsqu’il ouvrit le sixième sceau, alors il se fitd un violent tremblement de terre, et le soleil devint noir comme une étoffe de crin, et la lune devint tout entière comme du sang,

d Tous ces signes cosmiques, vv. 12-14, accompagnent chez les prophètes le Jour de Yahvé, Am 8.9. Ils symbolisent le déchaînement de la Colère de Dieu, cf. Mt 24.1.

13 et les astres du ciel s’abattirent sur la terre comme les figues avortées que projette un figuier tordu par la tempête, 14 et le ciel disparut comme un livre qu’on roule, et les monts et les îles s’arrachèrent de leur place ; 15 et les rois de la terre, et les hauts personnages, et les grands capitaines, et les gens enrichis, et les gens influents, et tous enfin, esclaves ou libres, ils allèrent se terrer dans les cavernes et parmi les rochers des montagnes, 16 disant aux montagnes et aux rochers : « Croulez sur nous et cachez-nous loin de Celui qui siège sur le trône et loin de la colère de l’Agneau. » 17 Car il est arrivé, le grand Jour de sa colère,e et qui donc peut tenir ?

e Var. « de leur colère ».

Les serviteurs de Dieu seront préservés.

7 Après quoi je vis quatre Anges, debout aux quatre coins de la terre, retenant les quatre vents de la terre pour qu’il ne soufflât point de vent, ni sur la terre, ni sur la mer, ni sur aucun arbre. 2 Puis je vis un autre Ange monter de l’orient, portant le sceau du Dieu vivant ; il cria d’une voix puissante aux quatre Anges auxquels il fut donné de malmener la terre et la mer : 3 « Attendez, pour malmener la terre et la mer et les arbres, que nous ayons marqué au front les serviteurs de notre Dieu. » 4 Et j’appris combien furent alors marqués du sceau : cent quarante-quatre millef de toutes les tribus des fils d’Israël.

f Le carré de douze (le nombre sacré), multiplié par mille la multitude des fidèles du Christ, peuple de Dieu, Israël nouveau, Ga 6.16, cf. Jc 1.1 ; 11.1 ; 20.9. Marqués du sceau divin, Rm 4.11, ils échapperont finalement aux fléaux attendus cf. Ex 12.7-14.

5 De la tribu de Juda, douze mille furent marqués ; de la tribu de Ruben, douze mille ; de la tribu de Gad, douze mille ; 6 de la tribu d’Aser, douze mille ; de la tribu de Nephtali, douze mille ; de la tribu de Manassé, douze mille ; 7 de la tribu de Siméon, douze mille ; de la tribu de Lévi, douze mille ; de la tribu d’Issachar, douze mille ; 8 de la tribu de Zabulon, douze mille ; de la tribu de Joseph, douze mille ; de la tribu de Benjamin, douze mille furent marqués.

Le triomphe des élus au ciel.

9 Après quoi, voici qu’apparut à mes yeux une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, de toute nation, race, peuple et langue ;g debout devant le trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, des palmes à la main,h

g Cette fois, c’est la foule des martyrs chrétiens déjà en possession du bonheur céleste, v. 14 ; 15.2-4.

h Les palmes du triomphe, évoquant la fête joyeuse des Tabernacles, Lv 23.33-34 ; etc. (au v. 15 la tente de Dieu deviendra leur demeure).

10 ils crient d’une voix puissante : « Le salut à notre Dieu, qui siège sur le trône, ainsi qu’à l’Agneau ! » 11 Et tous les Anges en cercle autour du trône, des Vieillards et des quatre Vivants, se prosternèrent devant le trône, la face contre terre, pour adorer Dieu ; 12 ils disaient :

« Amen ! Louange, gloire, sagesse,
action de grâces, honneur, puissance et force
à notre Dieu pour les siècles des siècles ! Amen ! »

13 L’un des Vieillards prit alors la parole et me dit : « Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils et d’où viennent-ils ? » 14 Et moi de répondre : « Monseigneur, c’est toi qui le sais. » Il reprit :i « Ce sont ceux qui viennent de la grande épreuve :j ils ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l’Agneau.k

i Pour le jeu de scène, cf. Za 6.4-5, et aussi 4.4-13.

j Les persécutions, dont celle de Néron était le prototype.

k Le sang symbolisait l’efficacité de la mort de Jésus, Rm 3.25 ; 1 Co 11.25 ; Ep 1.7 ; etc. Ce don est ici accepté par ceux qui en reçoivent les effets.

15 C’est pourquoi ils sont devant le trône de Dieu, le servant jour et nuit dans son temple ; et Celui qui siège sur le trône étendra sur eux sa tente.

16 Jamais plus ils ne souffriront de la faim ni de la soif ; jamais plus ils ne seront accablés ni par le soleil, ni par aucun vent brûlant. 17 Car l’Agneau qui se tient au milieu du trône sera leur pasteur et les conduira aux sources des eaux de la vie. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux. »l

l Ces images, courantes dans la tradition prophétique pour symboliser le bonheur eschatologique, cf. Os 2.20 ; Isa 11.6, seront reprises en 21.4.

Le septième sceau.

8 Et lorsque l’Agneau ouvrit le septième sceau, il se fit un silence dans le ciel, environ une demi-heure...m

m Comme dans la tradition prophétique, un silence solennel précède et annonce la « venue » de Yahvé. L’exécution des décrets consignés dans le livre ouvert va maintenant se dérouler, selon une nouvelle liturgie céleste marquée par sept sonneries de trompette, 8-9 ; 11.15-18.

Les prières des Saints hâtent l’avènement du grand Jour.

2 Et je vis les sept Anges qui se tiennent devant Dieu ; on leur remit sept trompettes. 3 Un autre Ange vint alors se placer près de l’autel,n muni d’une pelle en or.o On lui donna beaucoup de parfums pour qu’il les offrît, avec les prières de tous les saints, sur l’autel d’or placé devant le trône.

n L’autel des parfums, cf. Ex 30.1 ; 1 R 6.20-21.

o C’est la pelle à feu qui servait à transporter les braises ardentes de l’autel des holocaustes sur l’autel des parfums.

4 Et, de la main de l’Ange, la fumée des parfums s’éleva devant Dieu, avec les prières des saints. 5 Puis l’Ange saisit la pelle et l’emplit du feu de l’autel qu’il jeta sur la terre. Ce furent alors des tonnerres, des voix et des éclairs, et tout trembla.

Les quatre premières trompettes.

6 Les sept Anges aux sept trompettes s’apprêtèrent à sonner.p

p Sur le caractère symbolique de ces fléaux, voir 6.1. Ils semblent de plus être ici un rappel des plaies d’Égypte, Ex 7-10 ; Sg 11.5—12.2. Cf. 15.5ss.

7 Et le premier sonna... Il y eut alors de la grêle et du feu mêlés de sang qui furent jetés sur la terre : et le tiers de la terre fut consumé, et le tiers des arbres fut consumé, et toute herbe verte fut consumée. 8 Et le deuxième Ange sonna... Alors une énorme masse embrasée, comme une montagne, fut projetée dans la mer, et le tiers de la mer devint du sang : 9 il périt ainsi le tiers des créatures vivant dans la mer, et le tiers des navires fut détruit. 10 Et le troisième Ange sonna... Alors tomba du ciel un grand astre, brûlant comme une torche. Il tomba sur le tiers des fleuves et sur les sources ; 11 l’astre se nomme « Absinthe » : le tiers des eaux se changea en absinthe, et bien des gens moururent, de ces eaux devenues amères. 12 Et le quatrième Ange sonna... Alors furent frappés le tiers du soleil et le tiers de la lune et le tiers des étoiles : ils s’assombrirent d’un tiers, et le jour perdit le tiers de sa clarté, et la nuit de même.

13 Et ma vision se poursuivit. J’entendis un aigle volant au zénith et criant d’une voix puissante : « Malheur, malheur, malheur aux habitants de la terre, à cause de la voix des dernières trompettes dont les trois Anges vont sonner. »

La cinquième trompette.

9 Et le cinquième Ange sonna... Alors je vis un astreq qui du ciel avait chu sur la terre. On lui remit la clef du puits de l’Abîme.r

q Un des anges déchus, peut-être Satan lui-même, cf. v. 11 et Lc 10.18.

r Un ange ouvre le lieu où les anges déchus sont détenus en attendant le châtiment final, cf. 11.7 ; 17.8 ; etc.

2 Il ouvrit le puits de l’Abîme et il en monta une fumée, comme celle d’une immense fournaise — le soleil et l’atmosphère en furent obscurcis — 3 et, de cette fumée, des sauterelles se répandirent sur la terre ; on leur donna un pouvoir pareil à celui des scorpions de la terre.s

s L’invasion des sauterelles s’inspire de Jl 1-2 que déjà les Juifs interprétaient historiquement (d’après saint Jérôme) les quatre groupes de sauterelles représentant quatre envahisseurs successifs, Assyriens, Perses, Grecs et Romains ; cf. Jr 51.27. Ici, les sauterelles évoquent probablement les Parthes. Comme les sauterelles tourmentent les hommes sans les faire mourir, on a vu parfois dans leur invasion les tourments spirituels causés par les démons.

4 On leur dit d’épargner les prairies, toute verdure et tout arbre,t et de s’en prendre seulement aux hommes qui ne porteraient pas sur le front le sceau de Dieu.

t Qui symbolisent peut-être les fidèles du Christ préservés, cf. 7.1s.

5 On leur donna, non de les tuer, mais de les tourmenter durant cinq mois. La douleur qu’elles provoquent ressemble à celle d’une piqûre de scorpion. 6 En ces jours-là, les hommes rechercheront la mort sans la trouver, ils souhaiteront mourir et la mort les fuira !

7 Or ces sauterelles, à les voir, font penser à des chevaux équipés pour la guerre ; sur leur tête on dirait des couronnes d’or, et leur face rappelle des faces humaines ; 8 leurs cheveux, des chevelures de femmes, et leurs dents, des dents de lions ; 9 leur thorax, des cuirasses de fer, et le bruit de leurs ailes, le vacarme de chars aux multiples chevaux se ruant au combat ; 10 elles ont une queue pareille à des scorpions, avec un dard ; et dans leur queue se trouve leur pouvoir de torturer les hommes durant cinq mois. 11 À leur tête, comme roi, elles ont l’Ange de l’Abîme ; il s’appelle en hébreu : « Abaddôn », et en grec : « Apollyôn. »u

u Les deux noms se traduisent Destruction et Destructeur.

12 Le premier « Malheur » a passé, voici encore deux « Malheurs » qui le suivent...

La sixième trompette.

13 Et le sixième Ange sonna... Alors j’entendis une voix venant des quatre cornes de l’autel d’orv placé devant Dieu ;

v Pour signifier que le châtiment des païens fait suite à la prière des martyrs décrite en 6.9, 10 (cf. 8.2s).

14 elle dit au sixième Ange portant trompette : « Relâche les quatre Anges enchaînés sur le grand fleuve Euphrate. »w

w La région à l’Est de l’Euphrate était occupée par les Parthes, dont la cavalerie intervient dans ce sixième fléau, 6.2.

15 Et l’on relâcha les quatre Anges qui se tenaient prêts pour l’heure et le jour et le mois et l’année, afin d’exterminer le tiers des hommes. 16 Leur armée comptait deux cents millions de cavaliers : on m’en précisa le nombre. 17 Tels m’apparurent en vision les chevaux et leurs cavaliers : ceux-ci portent des cuirasses de feu, d’hyacinthe et de soufre ; quant aux chevaux, leur tête est comme celle du lion, et leur bouche crache feu et fumée et soufre. 18 Alors le tiers des hommes fut exterminé par ces trois fléaux : le feu, la fumée et le soufre vomis de la bouche des chevaux. 19 Car la puissance des chevaux réside en leur bouche ; elle réside aussi dans leur queue : ces queues, en effet, ainsi que des serpents, sont munies de têtes dont elles se servent pour nuire. 20 Or les hommes échappés à l’hécatombe de ces fléaux ne renoncèrent même pas aux œuvres de leurs mains : ils ne cessèrent d’adorer les démons, ces idoles d’or, d’argent, de bronze, de pierre et de bois, incapables de voir, d’entendre ou de marcher. 21 Ils n’abandonnèrent ni leurs meurtres, ni leurs sorcelleries, ni leurs débauches, ni leurs rapines.